<h1>Noelfic</h1>

[Confédération][2] Rêves Mécaniques


Par : Gregor

Genre : Science-Fiction , Action

Status : Terminée

Note :


Chapitre 18

Publié le 19/12/12 à 16:52:19 par Gregor

8.

Le simple fait de voir un visage enfin net, stable, qui ne tomba pas dans les ténèbres au bout d’un instant, m’indiqua que j’avais bien repris pieds, définitivement cette fois. On s’agitait autour de moi. Il ne devait y avoir que deux, peut-être trois autres personnes.
— Vous avez une bonne étoile, Gregor … Le sang écossais est décidément plus tenace que ce que je pouvais imaginer …
— Mon amiral …
Nielsen se tenait à mes coté, un sourire discret sur ses lèvres. Il avait troqué son habit d’apparat pour une tenue grise composé d’un pantalon et d’une chemisette aux coupes régulières, bien plus adaptés. Mais sa position émanait toujours, solaire, tandis que son visage encore tonique se penchait vers le mien.
— Vous ne vous en tirez vraiment pas trop mal. Les cybernautes ont annihilé le cheval de Troie qu’il avait fait transiter. Un acte très lâche … Le fait de reconfigurer cet homme a dû vous demander beaucoup d’énergie, et il comptait sans doute dessus pour vous rendre plus immobile qu’un légume …
— Cyrill a tout fait, justifiai-je d’une voix faible mais assuré.
— Sa mission d’Inquisiteur n’a été possible que grâce à votre force psychique. Ce traitre l’aurait rendu fou.
— Où-est-il ?
— Au frais. Même s’il ne présente plus une grande menace à présent. J’ai jugé que la décision de vie ou de mort sur cet homme, aussi mauvais soit-il, n’incombe à personne d’autre qu’au Magister.
Le fait de savoir qu’il finirait jugé par un tribunal fantoche me dérangea. Comme si, tout à coup, je pouvais éprouver de la sympathie à son égard. Idée ridicule, qui persista, en arrière-gout.
— Et le reste des colons ?
Nielsen marqua une pause, avant de prendre un air soudain plus grave.
— Même à plus de dix kilomètres de l’impact initial, c’est une chance que vous soyez là. Pour l’Inquisiteur Beik , sa survie à court-terme est plus problématique. Alors, hélas, tous les … sacrifiés, tous ces hommes n’ont pas survécu. Aucun d’eux.
Huey aussi. Je pouvais presque devenir quelle terreur cela avait dû être, dans les fractions de secondes qui avait précédées sa mort. L’angoisse de la finitude, brutale, terminale. Et puis la désintégration, la non-existence. Victime malgré lui, il n’en restait pas moins un rebelle. Bon, honnête, mais au mauvais endroit, au mauvais moment.
— Ils ne seront pas morts en vains, commentai-je avec dépit.
— Il n’y a aucune mort vaine dans une guerre.
— Mon amiral …
— C’est une guerre que nous sommes en passe de gagner, continua Nielsen, sans s’arrêter. Une guerre qui va supposer encore quelques combats. Et si vous souhaiter terminer ce qui a été commencé, Capitaine Mac Mordan, une place de choix vous y attend.
Williamsburg. Il restait Williamsburg, et ses mines. La tragédie de Franklin avait dû s’ébruiter. Prendre cette position serait un enfer, à défaut de la détruire.
— Je suis votre homme, mon amiral …
Il sourit, sortit de la pièce. Sur le pas de la porte, il se retourna, une dernière fois.
— Ce sera un honneur pour moi de me tenir aux côtés d’un héros, capitaine.
Sa présence ne fut plus qu’un souvenir. L’instant d’après, un cybernaute se penchait à nouveau sur moi. Silencieux, rapide, il achevait de réparer ce que Nielsen, dans sa volonté de bien faire, avait contribué à détruire. Je ne pouvais lui en vouloir. Mais les hasards étaient, ces temps-ci, redoutablement concentrés autour de moi.

Il se passa une semaine sans qu’aucune manœuvre d’envergure ne soit mise en place. La seule action notable était le débarquement du plus gros des troupes à quelques kilomètres de Williamsburg, et la constitution passive d’une tête de pont. La tension montait graduellement, tandis que l’issue s’approchait. Quoi qu’il advienne, la mutinerie serait matée. Au prix de la disparition d’un des plus importants gisements de rhénium disponible. Nielsen avait évoqué cette possibilité avec moi, seul à seul, lors d’une de ses nombreuses visites dans le quartier des blessés. Les cybernautes avaient fortement insisté pour que je reste en « observation simple ». La nature du virus qui m’avait malgré tout atteint les intriguait, et, d’autre part, ils ne souhaitent nullement courir un risque inutile en me voyant déambuler dans le vaisseau. Alors, je patientais, lion en cage. Et la visite de mon supérieur n’en était que plus distrayante.
Nous avions pris pour habitude de nous installer dans un des rares bureaux que les cybernautes n’utilisaient pas. Un local assez ridicule, pourvu de deux sièges encastrés dans des parois en plastique blanc, séparés par une table elle aussi fondu dans la masse. Le centre de celle-ci, ronde, était occupé par un projecteur hollo qui diffusait habituellement de vagues formes rondes, que je faisais jouer entre mes doigts. Ce jour-là, je ne dérogeais pas à la règle. L’air pensif, le brisais en fines sphères de gros œufs verdâtres, sans vraiment réfléchir. Nielsen s’était avancé, le menton posé sur ses mains croisées.
— Vous comprenez de quoi il en ressort, capitaine ?
C’était la seconde fois qu’il répétait la phrase. Je coupais court à mon petit jeu, le fixais droit dans les yeux.
— C’est une situation impossible.
Il soupira.
— Il faudra pourtant bien que nous trouvions une issue, et convenable.
— Qu’entendez-vous par là, mon amiral ?
Il pianota sur l’holo, fit surgir des données.
— Tout assaut frontal serait un désastre. Tant humainement qu’économiquement. Le Commandus Magnus m’a fait parvenir ses dernières directives voilà quelques heures. Il est inenvisageable pour la Confédération de détruire sa plus grosse source de rhénium. Il a lourdement insisté sur ce point.
— J’imagine que vous avez une idée, non ?
— Eh bien, poursuivit-il d’un ton décidé, pour être honnête, nous peinons à trouver une stratégie satisfaisante faisant appel à nos forces vive. En d’autres termes, nous devrons ruser, Mac Mordan.
Je n’aimais pas la tournure que prenait cet entretien.
— Vous souhaiteriez que la rébellion rende les armes proprement ? Sans faire d’histoire ?
— Il n’y a pas d’autres alternatives crédibles. Et c’est pour cela que j’ai pensé à vous.
— A moi ? Mais je n’ai aucune expérience en matière d’infiltration.
— A vrai dire, ce n’est pas vraiment un problème. Il vous suffira de vous renseigner via des banques de données pour contrer ce petit désagrément.
— Les cybernautes m’ont explicitement fait savoir que je ne pouvais, pour le moment, pas me rendre dans le reste du vaisseau, pour éviter de disséminer d’éventuelles spores du virus.
— Voilà qui va changer. J’ai consulté le major cybernaticus Elwin, et, au regard des dernières analyses qu’il a effectué, il juge le risque relativement acceptable.
— Et il ne m’en aurait pas fait part ?
— Le rapport date d’une quinzaine de minutes. Je voulais vous informer directement. Tout autant parce que je vous estime que pour la valeur que vous pouvez représenter dans cette dernière mission. Je sais pertinemment que je cours un gros risque, mais après réflexion, vous êtes un atout suffisamment solide.
Je ne répondis pas. Un lourd silence s’installa, avant que je ne me décide à le briser, une bonne paire de minutes plus tard.
— Je vous ai donné ma parole, mon amiral. Je suis prêt à me mettre à votre disposition, quelques en soit les conditions.
— Votre fidélité n’est plus à prouver, Mac Mordan. Tout ce que je demande, c’est que vous me fassiez part d’une tactique crédible qui se baserait sur une infiltration au sein de la rébellion, afin de les faire plier.
— Dans quels délais, mon amiral ?
Il soupira.
— Le temps nous presse à présent. Et vous ne disposerez pas, hélas, de plus de vingt-quatre heures.
— Vingt-quatre heures ? Mais c’est pure folie ! Comment pourrais-je à la fois rattraper mon ignorance et bâtir quelque chose qui soit un minimum …
— Le major cybernaticus palliera à cela, coupa-t-il. Il excelle dans ce genre de domaine. Vous faire ingurgiter cette masse de donnée ne lui sera pas bien difficile. Pas plus que de vous avoir ramené parmi nous en pleine possession de vos moyens.
Il pianota sur l’holo, et quelques instants plus tard, débarquait un cyborg aux traits longilignes, maigre, que je redécouvrais sou un autre angle. Elwin était effectivement un puits de connaissance et de savoir-faire. Le genre d’homme très précieux qui ne débarquait que rarement au sol, constamment harnaché à une IA ou bien occupé à remettre sur pied d’autres cyborg. Il était entré sans frapper, sans s’excuser, et sans mot dire, se tenait dans une position d’attente.
— Assurez-vous que la capitaine Mac Mordan soit au clair avec ce que je vous ait exposé brièvement tout à l’heure, major cybernaticus.
— Bien, mon amiral, approuva Elwin.
— Quant à vous, Gregor, je vous attends le plus rapidement possible.
— Oui, mon amiral.
Nous nous saluions. Nielsen sortit en premier, nous laissant seul, moi et le major cybernaticus.
— je préfère vous prévenir, capitaine, commenta Elwin. Ce que vous allez voir est relativement déroutant.
— Que voulez-vous dire ?
Il souleva un coin de lèvre, que je pris pour un sourire.
— Il va falloir remonter aux sources même du Rezo. Et croyez-moi, le spectacle risque d’être mouvementé.

L’écho éternel de la ville explosée, fragmenté en milliers de particules, sur laquelle chaque rue se développait en d’aberrantes constructions. Le ciel n’était qu’un chaos luminescent, bercé par des tons de mauves si variés que l’infini s’y créait. Je vacillais, aspiré par le vide tout autant que le plein, dans cet univers disparates, grotesques, onirique.
— Ne tombez pas, capitaine. Cela ferait mauvaise impression …
La main sûre d’Elwin m’avait agrippé par le col. Je prenais conscience que j’avais retrouvée des habits que je ne portais plus depuis des années. Une chemise, un pantalon de toile, des sandales bon marché au cuir tanné. L’air me gonflait la poitrine, purulent de parfums d’essence, de benzènes, de fumées âcres, d’humidité. Le vent lui-même me léchait les joues, les sourcils, la tignasse indomptable qui ondulait et faisait office de cheveux. J’avais le sentiment d’être redevenu pleinement vivant, à la fois fragile et puissant, en quête d’éternité. Une éternité virtuelle, qui prenait place ici, dans ce non-monde multicolore, où nous étions deux, assis sur le faîte d’un édifice insondable.
— Je vous avais prévenu, capitaine, souffla d’un ton amusé Elwin. La vie, ici, est des plus étonnantes. Peut-être parce que ce n’est qu’une forme imaginaire. Un pur produit des fantasmes collectifs. L’essence même de l’Homme …
Il fallait que je me souvienne. L’attitude raide du major cybernaticus, lorsqu’il m’installa dans un fauteuil à connectique. La morsure acide des trodes, qui se prolongeaient en long filament, dans mon cerveau, et brisant jusqu’aux plus intimes sensations. Le tourbillon de la réalité, la chute, l’angoisse, puis cette explosion de couleur. Et Elwin, à côté de moi, qui s’asseyait en tailleurs, sur le marbre fracturé d’un parvis monumental, constructivisme archaïque qui s’effilochaient doucement, mais surement. Nous ne pouvions pas rester éternellement, même si l’envie était cruellement là, évidente.
— Le temps ne s’écoule plus ici, n’est-ce pas ?
— Différemment, capitaine. C’est un temps subjectif, pleinement dépendant de la conscience de chacun. Il arrive qu’il se suspende parfois, mais c’est un fait très rare. Et je n’ai pas l’impression que ce soit notre cas.
Ce n’était pas ce que je percevais. L’onde lente, inconnue, qui animait les rochers, les immeubles cyclopéens, nous frôlant doucement, ne faisait que confirmer mon sentiment. Tout cela allait plus loin que quelques lois explicables, défiant la nature même de la Confédération. J’en restais déstabilisé, presque incapable de réfléchir.
— Vous cherchez quelque chose d’assez simple, en réalité, continua-t-il. Une grosse base de données qu’on croise assez souvent.
— Vous avez déjà « guidé » d’autres soldats ?
Il se permit un sourire en coin, ravageur.
— C’est une partie non négligeable de ma mission, capitaine. Le Rezo est trop complexe, trop insensé, si on ne connait pas ses codes. Imagions que je vous abandonne ici, vous ne pourriez pas rester plus de dix secondes dans une position stable et cohérente.
— Alors ne me lâchez pas, major. Je serais bien en peine.
— Et moi donc …
Je remarquais seulement à ce moment-là l’énorme masse de béton, accompagné de son cortège de météoritique et hétéroclites objets, s’avancer à notre rencontre. Silencieux, ils nous avaient pris au dépourvu, d’un mouvement mou qui se dressait sur nos arrières, élançant leurs lignes raides typiques de l’art déco du siècle dernier. L’effrayant nombre de fenêtre créait une dynamique sur la façade grise de gratte-ciel, monolithe ajouré où parfois s’agitait la toile fine d’un rideau couleur de terre, intrépide. Le rythme des colonnes raides, lourdes, imperturbables, nous écrasait d’une noblesse quasi-guerrière. La seule concession à la rudesse de l’édifice résidait à sa base, dans une série d’arcade simple, donnant accès à un immense hall dont nous ne percevions encore que des ombres floues, inquiétantes. Quelques marches séparaient la structure du vide béant.
— Nous y voilà, déclara sans prétention Elwin.
Il se lança dans l’espace plan qui nous séparait de l’immeuble, qui percuta sans violence notre ridicule plateforme. Je restais debout, de longues secondes, fixant la cime qui luisait d’un éclat métallique, flèche imperturbable qui narguait le ciel. Oui, nous y étions. Aux portes du savoir, du passé et du futur réuni. Je frissonnais, sans doute dépassé par une désagréable impression. Le regard d’Elwin, lorsque je me décidais enfin à revenir à des considérations plus simples, eut pour effet de me faire avancer. Le bruit sec de me spas résonna longtemps, bien longtemps après que nous eussions franchis l’escalier et les portes monumentales du gratte-ciel flottant.

L’air frais soufflait par à-coup, chargé d’une poussière aux éclats dorées, qu glissait délicatement à travers l’immense vide de la pièce. Loin, bien loin au-dessus de nous se tenait un plafond dont on ne distinguait que les lignes fortes de corniches carrées, rectilignes. La poussière continuait, imperturbable, poussé vers le fond du hall, qui se perdait également dans la pénombre. Bien assez tôt, je cessais de la suivre, trop distrait par la résonnance que le vidée créait tandis que toujours, j’avançais. Bien qu’immense vu de l’extérieur, je commençais à douter que l’intérieur du gratte-ciel possède de véritables limites. L’espace d’un instant, je cru cerner le bord d’un infini de données, précieusement rangées en une grille parfaite, d’où rien ne dépassait. Un instant seulement, avant que les murs ne se rapprochent, ne barrant à nouveau la vue.
— Et maintenant ?
Elwin se tenait une bonne vingtaine de mètre plus en avant. Seule sa peau claire se détachait du fond gris et trouble que constituait les murs du hall. Même l’élégant chapeau de feutrine qu’il avait fait surgir dans sa main avait disparu.
— Je ne comprends pas, articulais-je distinctement, pour bien être sûr qu’il m’entende.
— Vous devez bien avoir une idée de par où commencer, non ?
— L’amiral a dû vous le dire pourtant … Je n’ai jamais été bien au clair avec les stratégies militaires.
Un rire discret se répandit quelques secondes, avant que la voix un peu trop légère d’Elwin ne se répercute à nouveau sur les murs.
— Pas vraiment, capitaine. A son sens, c’est ce manque de connaissance qui est pour lui une force. Du moins, c’est ce que lui m’a dit.
L’amiral, et son sens aigu de la répartie, avaient encore fait mouche. Même si, dans une certaine mesure, j’approuvais quelque peu le fond de sa pensée. Un homme définitivement étonnant, aussi borné qu’aimable, aussi franc que bon vivant, aussi simple que courageux. Même les horreurs de Franklin, qui ressurgissaient soudainement, ne le rendaient pas moins bon.
Et tandis que j’avançais pour rattraper Elwin, perdu dans mes pensées, il m’interpella.
— Capitaine, pensez-vous que l’amiral vous aurez fait venir ici pour ne rien trouver ?
— Je ne sais pas … Il serait capable d’agir ainsi.
Il soupira.
— Il est parfois étonnant. Même si je travaille avec lui depuis quelques temps déjà, en réalité, je ne le connais pas. Personne ne le connait vraiment. Ca ne le rend pas moins efficace dans sa tâche de commandant de vaisseau.
— Je ne crois pas que nous ayons à porter de jugement là-dessus, major.
— Excusez-moi, capitaine.
Il reprit silencieusement, comme si tout ceci suivait une logique. Hélas, cette même logique m’échappait totalement, et pis encore, une impression d’étrangeté s’immisçait à mesure que la pénombre se jouait de nous. Lorsque le gris eut fini de remplacer la faible luminosité du jour entrant par les portes vitrées désormais invisibles, je sentis le sol se dérober. Le mouvement flou, en fondu, était d’une douceur inquiétante. Et dans ce magma informel, je perdais pour quelques temps la notion de Rezo, de guerre, de Prima, de Nielsen. J’oubliais à peu près tout, sauf le gris de la pénombre.

Le livre était ouvert en page soixante-dix-sept. On l’avait tenu bien propre, en dehors de quelques graffitis au crayon à papier en marges des illustrations en noir et blanc. Malgré son teint jaune d’hépatopathique littéraire, je m’approchais, comme mis en confiance. J’ignorais depuis combien de minutes ou bien d’heures je me tenais assis face à lui, callé sur une chaise au dossier confortable. Une fenêtre, légèrement entrouverte, distillait un air frais mais agréable dans la pièce. Ambiance printanière, le soleil en plus, les rires d’enfants sur la terrasse en moins.
Je ressentais un calme profond, sans doute lié à ce livre. En y repensant, je pressentais le savoir, que j’avais accumulé d’une lecture distraite, oubliée. Seuls remontaient les images fugaces, mêlées de quelques explications sommaires sur un sujet que je peinais à distinguer dans sa globalité. Pêle-mêle je retrouvais des noms d’armes, des grades, certains poisons, des images, des prévisions temporelles précises, des emplacements. Beaucoup d’emplacements par rapport au reste en réalité, et cela alimentait encore davantage ma perplexité. Je m’apprêtais à dire que je n’y comprenais rien, que les stratégies militaires ne m’intéressaient pas, et ces idées résonnèrent comme un pieux mensonge qui provenait de je-ne-sais-où. Non, je reprenais pied. J’étais un militaire, simplement venue ici pour apprendre quelque chose, pour détruire une organisation félonne de l’intérieur. La stratégie avait toute son importance, et à présent, j’en détenais la clef de voute. J’ignorerais l’acte d’acquisition en lui-même, me concentrant sur le simple fait que savoir suffisait.
Une sensation écœurante me coupa en pleine réflexions. A présent, les contours flous de ce savoir ressortaient, toujours plus nets à chaque instant. Le peu d’humanité qui restait, assis sur cette chaise virtuel, s’insurgeait contre l’horreur des images, des mots, des concepts et des actes à venir. Passé présent et futur ne formaient plus qu’une boue noire et nauséabonde, dans laquelle les effluves du sang et de la honte prenaient une part importante. Le livre vira au rouge, suintant d’un liquide tiède et gras, qui se répandait soudainement au sol, en d’abondantes giclées. La pièce se déforma, tremblotante, et je reculais précipitamment vers les abymes sombres d’où je venais.

— Vous avez vu quelque chose ?
La pluie bat l’esplanade en milliers de flèches aquatiques, détournant la chaleur passée en air froid et pénétrant. Sous l’averse, Elwin perdait de sa superbe, et seul son regard paraissait encore suffisamment lumineux pour qu’il soit énigmatique.
— Oui, murmurai-je.
— Et des informations tactique sont remontées ? Vous avez quelque chose de concret à proposer à l’amiral ?
Je le dévisageai.
— Vous n’avez pas confiance ?
Il blêmit, porta ses mains face à moi, en signe d’excuse.
— Je ne voulais pas vous offensez, capitaine … Simplement vous aider.
Je soupirais, et partait à la recherche d’une série de pages jaunies, égarées dans une poche.
— Major, continuai-je tout en lui tendant la liasse de documents, j’aimerais avoir votre avis là-dessus.
— Mais, je ne suis pas tacticien, capitaine.
— Je le sais très bien. Et c’est pour ça que je le demande à vous, ici …
Elwin haussa un sourcil, me fixa quelques secondes, et se lança dans la lecture. Son visage se troublait de froncement de lèvres et de regards perdus à plusieurs reprises, le tout dans un silence simplement rompu par le clapotement des gouttes sur la dalle glacée de l’esplanade.
— J’aurais deux questions à vous poser, capitaine. Après quoi nous partirons.
— Et quelles sont-elles ?
— Avez-vous induit ce qui s’est déroulé dans la banque de données ?
— Non, major … Je ne savais pas ce que je cherchais, comment aurais-je pu …
— Je voulais en être sûr, capitaine. La seconde question est de savoir si vous comprenez les enjeux que cette tactique fait peser sur le conflit ?
Nouveau silence, de ma part. Elwin avait laissé tomber son masque de politesse et de sourire amical, son visage se teintant désormais d’un mélange de doute, de peur et de colère.
— Oui, major. Et je dois bien vous avouer que c’est cela même qui me cause le pire tort …
— Bien …
— Que comptez-vous faire ?
Il me fixa à nouveau, ruisselant d’une sueur nouvelle, inquiétante.
— Je vous aiderais, capitaine. Je m’occuperais personnellement de la partie logistique et technique de cette mission. Mais comprenez bien que personne ne devra être mis au courant avant le début des opérations. Pas même l’amiral.
— Il insistera, Elwin …
Un sourire triste pointa sur ses lèvres, et il leva les yeux vers le ciel bouché de nuages.
— Je m’en occuperais aussi … Je le connais suffisamment pour que ses réactions ne me soient pas inconnus.
Il esquissa quelques pas, se dirigeant vers le bord de la place, et s’arrêta à quelques mètres de son ancienne position.
— Rien ne sortira d’ici, capitaine. Ce que nous nous apprêtons à faire relève de la trahison, même si l’objectif est des plus louables.
Je hochai la tête, et me dirigeai vers l’homme détrempé qui me précédait. Nous nous regardions une dernière fois, presque gênés, et quelques secondes plus tard, le paysage disparate du Rezo se disloquait en de grossières volutes de fumées.

Commentaires

Pseudo supprimé

10/05/11 à 16:27:21

Alors, alors...

Username: Sheyla Benti
Âge : 23 ans ( années atlantes. )
Description : En deux parties.
Avant cybernétisation, Sheyla était assez grande et mince. Du haut de son mètre soixante-quinze pour cinquante-quatre kilos, elle pouvait observer le monde de ses beaux yeux vers. Rien ne l'empêchait de monter sur un talus et de se tenir droit rien que pour sentir le vent filer dans ses cheveux bruns.

Après cybernétisation :
La taille reste la même, elle a prit dans la centaine de kilos en implant de toutes sortes. Son visage est presque entièrement resté organique, elle aura gardé son regard envoûtant... ou presque. En effet, si l'on regarde bien son oeil droit, l'on peut apercevoir que la pupille est d'un bleu profond. ( Résultat d'un implant visant à améliorer les réflexes. )



Histoire : Hum... Voyons ( puisque le temps presse. :noel: ), une équipe de sauvetage Atlante à été dépéchée pour retrouver/Enquêter sur la disparition d'une sorte de convoi. Une équipe composée d'une dizaine d'hommes ( Je te résume en gros, j'pourrais en faire une nouvelle. :hap: ), tous décimés jusqu'au dernier par un groupement de cyborgs. Sheyla a eu énormément de chance (si on peut le dire. ), une grenade à Impulsion lui a littéralement emporté les jambes et propulsé contre un mur. Une douleur immense, des cris et des gémissements ( blablabla. ). La brunette était mourante, paralysée par la peur et la surprise, jetant ses yeux verts clair sur les restes calcinés de son équipe. Elle s'est réveillée en temps que confédérée. Le destin lui a offert une seconde chance.







Bon, voilà. :hap:

CrazyMarty

07/09/10 à 16:11:36

et moi qui pensais que ça ferais encore too much >< ...

Pseudo supprimé

07/09/10 à 16:04:45

J'ai jamais ma dose :noel:

CrazyMarty

07/09/10 à 15:57:04

ça (re)viendra. T'as pas eu ta dose avec Keller dans AE :noel: ?

Pseudo supprimé

07/09/10 à 15:54:38

J'aurais aimé plus de détail sur l'opération... :sournois:

Pseudo supprimé

06/09/10 à 10:37:01

Les histoires de famille, ça ne me regarde pas :noel: ....





Envoie la suite bordayl !

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